Critique de Le torrent de Simon Lavoie

Le style et maniérisme de Simon Lavoie, déjà perceptibles dans ses deux premiers films, font de ce matériau de base riche en émotions une oeuvre forte et singulière.

Le torrent de Simon Lavoie (Victor Andrés Trelles Turgeon, Laurence Leboeuf)

Le torrent de Simon Lavoie (Victor Andrés Trelles Turgeon, Laurence Leboeuf ©Lusio Films)

Rarement aura-t-on montré avec autant de passion et de force évocatrice la torture psychologique qui résulte de l’opposition entre le bien et le mal. La mère veut se racheter en devenant une bonne chrétienne et en ayant un fils prêtre, mais ce faisant, elle inflige à son fils un traitement digne d’Aurore l’enfant martyre, Amica voudrait aimer cet homme perdu, mais ne peut s’empêcher d’aller contre sa volonté.

Intérieurs et extérieurs se confrontent également. Entre l’emprisonnement dans la ferme et l’indomptable force de la Nature (comprendre l’indomptable force de notre personnalité) le combat est de tous les instants. La noirceur et l’obscurantisme des préceptes judéo-chrétiens (les scènes d’intérieur) combattent la luminosité des extérieurs, sereins et paisibles, du moins en apparence. Mais cette beauté naturelle se révèle finalement n’être qu’une autre prison pour François, aussi sauvage et aussi terrorisante que la force brute de la mère acariâtre.

Plongé dans ces univers dans lesquels il lui est impossible d’évoluer, et dépossédé de toute possibilité de communication avec son environnement et ses semblables, François ne connaît d’autre méthode que celle d’acheter une présence humaine à ses côtés, présence qui s’avèrera elle aussi n’être qu’une torture supplémentaire. Ne reste comme allié que ce torrent, puissant et fougueux, dont seules les sonorités parviennent à traverser les tympans ravagés.

À l’image de son personnage central, Le torrent est une œuvre torturée, ciselée avec précision mais frôlant souvent l’exercice de style ou l’excès de maniérisme. En outre, les circonvolutions du scénario se perdent en longueur et utilisent de nombreux retours en arrière très explicatifs qui affaiblissent le film plus qu’ils ne le servent. Malgré tout, l’interprétation et la direction d’acteurs conjuguées à l’immense beauté de la photographie et de la direction artistique hors pair élèvent Le torrent au rang de film fort et singulier.

Le torrent – Québec, 2012 – Durée: 2h33 – Classement: Général (déconseillé aux jeunes enfants) – Dans le Québec rural des années 20, une mère autoritaire élève seule son fils selon les préceptes très stricts de la religion chrétienne dans l’espoir d’en faire un prêtre. Refusant cet avenir, le jeune homme confronte sa mère. La violente altercation qui s’en suit le rend sourd… – Avec: Victor Andrés Trelles Turgeon, Laurence Leboeuf, Dominique Quesnel – Scénario et Réalisation: Simon Lavoie, d’après Anne Hébert – Production: Marie-Dominique Michaud, Jacques Blain de Lusio Films – Distribution: Remstar

Ma note: 

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★★★★ Très bon
★★★ Bon
★★ Moyen
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