[Critique] La cicatrice: lourd fardeau

La cicatrice tire partie de la belle photographie de Glauco Bermudez, qui donne à ce très sombre récit un peu de la lumière dont il a tant besoin.

Pour son premier long métrage de fiction, le jeune réalisateur Almatois, Jimmy Larouche, a choisi dans La Cicatrice d’aborder le sujet de l’intimidation et du harcèlement, un thème peu présent dans la cinématographie québécoise. Dans ce drame ambitieux, un homme solitaire et taciturne retrouve un ancien rival de jeunesse qui s’était rendu coupable de brimades à son endroit. Ayant déjà tout perdu dans la vie, cet homme que rien ne peut plus sauver est bien décidé à se faire justice.

Marc Béland dans le film québécois La cicatrice (©Pipingo Films)

Marc Béland dans le film québécois La cicatrice de Jimmy Larouche (©Pipingo Films)

Jeunesse difficile, chômage, famille abusive ou disloquée, voilà autant de travers de société utilisés par Larouche pour tracer des portraits sombres, marqués par la fatalité. Empêtré dans un pathos omniprésent, teinté de pessimisme et d’irréversibilité, ce drame particulièrement rugueux a de quoi émouvoir. Toutefois le film de Larouche éprouve cependant quelques difficultés à rendre touchant son sujet, même si les cris de douleur et les injustices flagrantes abondent. Ce manque d’attachement ne vient pourtant pas du récit. Il vient sans doute de la surcharge d’effets émotionnels utilisés pour définir les contours d’un personnage principal, sorte de looser absolu, qui cherche par tous les moyens à se venger et à réparer l’affront. Le comédien Marc Béland porte le récit à bout de bras, mais ses tristes turpitudes ne nous remuent finalement pas entièrement.

Au plan de la construction, le film s’en sort un peu mieux. La structure narrative est basée sur de nombreux retours en arrière situés à deux étapes importantes de la vie des protagonistes, le début et la fin de l’adolescence. Ces allers-retours dans le passé, d’abord distants, entrent peu à peu en résonnance pour mieux se rejoindre et trouver leur pleine signification dans une scène finale casse-cou, mais correctement maîtrisée.

Filmé à la manière d’un hui-clos théâtral à la tension graduelle, ce dénouement choral où les différents âges des protagonistes se répondent comme autant de fantômes du passé, ouvre la porte à une interprétation particulière de l’acte suicidaire, montré non seulement comme une libération mais surtout comme un transfert de douleur que l’agressé retourne vers l’agresseur, le marquant ainsi pour la vie.

La Cicatrice, peut-être un peu trop ambitieux pour un premier film, constitue néanmoins un premier long métrage prometteur, à condition que Larouche parvienne à alléger quelque peu le poids de ses métaphores.

La cicatrice – Québec, 2012, 1h19 – Un homme qui a vécu des brimades dans son enfance retrouve son harceleur bien des années plus tard et lui fait subir à son tour l’humiliation – Avec: Marc Béland, Patrick Goyette, Normand d’Amour – Scénario et Réalisation: Jimmy Larouche – Production: Patricia Diaz, Jimmy Larouche – Distribution: Alma Films

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