[Critique] Le mirage : fantasmes et désillusion

Le mirage voudrait être une satire virulente sur notre mode de vie occidental, mais au final ne livre qu’une petite comédie noire trop souvent concentrée sur le dessous de la ceinture. On rit jaune mais le message – évidemment très lourdement appuyé – est vite répétitif.

Image des comédiens Louis Morissette (Patrick) et Patrice Robitaille (Michel) dans le Mirage de Ricardo Trogi (source : films Christal)

Louis Morissette (Patrick) et Patrice Robitaille (Michel) dans Le Mirage de Ricardo Trogi (source : films Christal)

Si Le mirage n’est pas à proprement parler une suite à Québec-Montréal et Horloge biologique, on pourrait pourtant le considérer comme leur descendant naturel. Patrice Robitaille, qui était déjà dans les deux précités, fait le lien entre les trois histoires. Les trentenaires « trogiesques » ont oublié leur trip de gars sur la 20, leurs appréhensions face à la vie de couple se sont effacées et la vie s’est tassée. La banlieue, les belles situations, la vie de famille. En quinze ans, les jeunes professionnels ont troqué leur petite japonaise manuelle pour la voiture allemande cossue. Dans cette vie rêvée fabriquée de toutes pièces, la réussite sociale se mesure au luxe du bungalow de banlieue et la plénitude sexuelle à la forme d’un bonnet D. Désincarné, le quarantenaire surmené lâche prise et s’abandonne aux enfers du matérialisme.

À partir de ce sujet très en vogue dont la télé s’est déjà emparée, Trogi et ses auteurs (Morissette et Avard) livrent un objet hybride, qui n’est pas une comédie loin s’en faut, même si dans ses premières scènes quelques répliques donnent un ton décalé. Le mirage n’est évidemment pas une chronique sociale – malgré de faux airs de réalisme – tant le trait est gros. S’appuyant sur des personnages connus (les fantasmes du mâle québécois inassouvi étaient déjà la base des deux films précités), le film livre une critique de la société faisant preuve d’un humour cliché et unidimensionnel. Souvent situé en dessous de la ceinture, notamment par le biais de saynètes émoustillantes dans lesquelles de jeunes femmes pulpeuses et délurées se prêtent au jeu, le rire vire au jaune vif. On l’aura compris, ce fantasme permanent est mené par le cynisme et la caricature, sans oublier la misogynie, très présente aussi.

Mais la charge satirique, hélas, ne présente que bien peu d’intérêt passé les premières minutes. L’intrigue tourne rapidement en rond après avoir planté le décor. Les péripéties montrant l’asservissement et la désillusion s’enchaînent à la va-vite, façon liste d’épicerie, et l’on comprend que rien ne pourra inverser le déclin du personnage principal. Reste alors à supporter le fardeau, à faire œuvre charitable et finir ce pensum sans s’être vraiment reconnu, ni sans avoir bien saisi ses enjeux. On se contentera de quelques bons coups visuels (les prix style IKEA sur l’écran, du déjà vu, mais toujours aussi bien utilisés) et de deux ou trois scènes adroitement troussées (la virée dans le club échangiste, la sortie à Québec). Mais avec un sujet si mince et finalement très prévisible, c’est beaucoup trop peu pour garder l’attention.

Le mirage – Québec, 2015, 1h41 – un quarantenaire surmené et dont la vie de couple bat de l’aile ne trouve plus de plaisir dans vie surconsommée – Avec: Louis Morissette, Julie Perreault, Patrice Robitaille, Christine Beaulieu – Scénario: Louis Morissette, François Avard – Réalisation: Ricardo Trogi – Production: Christian Larouche – Distribution: Films Christal

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