[Critique] La mise à l’aveugle: une très bonne main!

Attachant et ironiquement drôle, La mise à l’aveugle, second film de Simon Galiero, est une réussite sur toute la ligne, un vrai bonheur de cinéma.

Micheline Bernard et Marc Fournier dans La Mise à l'aveugle de Simon Galiero

Micheline Bernard et Marc Fournier dans La Mise à l’aveugle de Simon Galiero (image: FunFilm)

Denise est une femme fragilisée. Ayant quitté son mari, étant royalement ignorée par son fils et se sentant un poids pour ses anciens collègues de travail, Denise change de vie et s’installe dans le quartier populaire de son enfance. Là elle devra apprendre à vivre dans une communauté où les codes et les conduites n’ont rien à voir avec ceux qu’elle vient de quitter. L’opposition de styles entre la froideur de Denise et son nouvel entourage grouillant et désordonné, fournit alors à Galiero une occasion précieuse de jouer sur les différences et de mener à bien sa valse-hésitation entre deux univers que tout oppose en apparence.

L’ex-comptable cartésienne et minutieuse délaisse l’ambiance aseptisée de lieux froids et symétriques dans lesquelles on se fait face en gardant une bonne distance, et plonge tête baissée dans un monde plus charnel où le jeu n’est autre qu’une reproduction de codes et de rituels tout aussi déstabilisants. Dans cette histoire de transition, Galiero filme les espaces comme autant de lieux d’errance et met littéralement en scène portes, couloirs, ascenseurs ou escaliers roulants pour exprimer la mouvance de son personnage central, à la jointure de deux mondes.

Il y a des couleurs à la André Forcier ou à la Marcel Carrière dans le regard empreint d’humour et de tendresse porté par l’auteur sur ses personnages. Ce clin d’œil à un cinéma populaire québécois désormais oublié renforce l’originalité du film. Galiero réalise même le tour de force de faire revivre, dans une magistrale satire de l’arrivisme, la mythique vulgarité d’Elvis Gratton personnifiée par un Julien Poulin au mieux de sa forme, fait saillant mais non des moindres d’une galerie de portraits attachants incarnés par des comédiens peu connus qu’il est plaisant de (re)découvrir ici. Ces figures sincères du « ti-peup’ » québécois sont d’autant plus délectables qu’elles évoluent dans un univers cinématographique parfaitement maîtrisé.

Très personnelle, la réalisation de Simon Galiero joue à merveille sur les couleurs – la scène d’ouverture est remarquable – et sur les espaces agencés de manière à faire ressortir les symétries et la verticalité des lieux. La mise à l’aveugle  est une comédie populaire qui fait du bien et qui se démarque de la cinématographie québécoise actuelle, plus souvent qu’autrement plongée dans le pessimisme et la noirceur.

La Mise à l’aveugle – Québec, 2012, 1h20 – Denise, directrice financière à la retraite, emménage dans son quartier d’enfance. Délaissée par son mari et son fils, Denise ne tarde pas à être initiée au poker par ses voisins de palier. Peu à peu, elle cède au plaisir du jeu et devient imbattable – Avec: Micheline Bernard, Louis Sincennes, Marc Fournier, Christine Beaulieu, Julien Poulin, Pierre-Luc Brillant – Scénario ; Réalisation et Production: Simon Galiero – Distribution: FunFilm

Ma note: 

Les notes :

★★★★★ Excellent
★★★★ Très bon
★★★ Bon
★★ Moyen
Mauvais

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