[Critique] Les routes en février : torpeur presque irréelle

Les routes en février est un premier film sensible et délicat, dans lequel les regards, les attentes et les malaises en disent aussi long que bien des dialogues. À voir sans faute sur grand écran.

Arlen Aguayo Stewart (d.) dans Les routes en février de Katherine Jerkovic (la jeune femme est sur le siège arrière d'une moto conduite par un jeune homme)

Arlen Aguayo Stewart (d.) dans Les routes en février de Katherine Jerkovic (1976 Productions)

La Montréalaise Katherine Jerkovic s’affirme comme une voix à suivre avec Les routes en février, un premier long métrage de fiction attentif et atmosphérique qui suit le rapprochement d’une jeune néo-Québécoise et de sa mamie uruguayenne. Sarah veut en savoir plus sur la mort de son père, qui a quitté son pays dix ans plus tôt. Pour sa part, Magda, la grand-mère paternelle de Sarah, n’a jamais digéré la perte de son fils. Un voyage, un retour aux sources, une rencontre… et pas mal d’incompréhensions. Des secrets de famille profondément enfouis dans le silence qui offrent à la réalisatrice l’occasion de façonner une œuvre délicate, dans laquelle les regards, les attentes et les malaises en disent autant que bien des dialogues. Et c’est là que réside la force tranquille de ce parcours initiatique qui propose en outre quelques réflexions universelles, sur l’errance, le désœuvrement de la jeunesse et le conflit générationnel, en plus de dresser des portraits de femmes réalistes.

Le besoin de se construire, la recherche de la vérité et l’avenir incertain de Sarah (Arlen Aguayo Stewart, belle découverte du film) servent de base à une intrigue sincère, exempte de pathos, mais qui tient sur des enjeux narratifs très ténus, dont certains auraient mérité d’être plus approfondis (la relation entre Sarah et le jeune homme, entre autres). Quoi qu’il en soit, Les routes en février s’avère une incursion juste dans un univers déjà fortement balisé (le récit d’apprentissage), qui doit également sa beauté aux images de Nicolas Canniccioni, aussi à l’aise pour embrasser les panoramas que les intérieurs exigus de la modeste maison de l’aïeule. Supportés par une trame sonore délicate, les superbes plans larges baignés de torpeur offrent à l’été de Sarah des airs de voyage hors du temps, presque irréel, et durant lequel il sera question de dire adieu au passé. Ses retrouvailles avec des lieux qui l’avaient tant marquée lui donneront l’occasion de replonger une dernière fois dans ses souvenirs d’enfance, et de prendre enfin conscience que la suite des choses s’écrira ailleurs. Les routes en février est un premier film touchant, sensible, et dépaysant, à voir sans faute sur grand écran.

Les routes en février – Québec, 2018, 1h34 – une jeune néo-Québécoise retourne en Uruguay, son pays natal, pour rendre visite à sa grand-mère et ainsi mieux comprendre les raisons du décès de son père – Avec: Arlen Aguayo Stewart, Gloria Demassi – Scénario: et Réalisation: Katherine Jerkovic – Production: 1976 Productions – Distribution: Axia Films

Ma note: 

Les notes :

★★★★★ Excellent
★★★★ Très bon
★★★ Bon
★★ Moyen
Mauvais

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