Critique du film Being at home with Claude

Alliant rythme haletant d’un Montréal réprouvé par la morale et théâtralité d’une enquête qui n’en finit plus de chercher des raisons, Jean Beaudin filme le choc de deux mondes cohabitants sans se comprendre.

Being at home with Claude de Jean Beaudin (Roy Dupuis)

Being at home with Claude de Jean Beaudin (Roy Dupuis РColl. Cin̩math̬que qu̩b̩coise)

En choisissant de mettre en scène l’interrogatoire d’un jeune prostitué coupable de crime passionnel, René-Daniel Dubois mettait en scène la rencontre et l’implosion de deux univers. D’un côté, l’univers enraciné dans les valeurs traditionnelles, rassurantes et pré-établies de la société « normale » et de l’autre côté, il y a le monde d’Yves, un univers nocturne radicalement opposé ou le regard réprobateur des autres. Yves se sert de la vie comme d’une arme, ou la passion extrême est le moteur même de l’existence et ou la notion d’amour ne peut se concevoir que dans l’éternité de la mort.

Cet univers trouble, haletant, passionné et déchirant est merveilleusement symbolisé dans les 8 premières minutes du film, dans la séquence pré-générique, qui restera à mon sens, comme étant l’une des séquences les plus marquantes du cinéma québécois.

Insistant sur ce choc, Jean Beaudin, grandit la différence d’âge entre les deux protagonistes, moins marquée dans la pièce originale, pour élargir encore plus la confrontation à celle de deux générations : l’inspecteur, qui pourrait être le père d’Yves, reste incrédule devant l’histoire passionnelle peu ordinaire de celui qui aurait pu être son fils incompris.

La mise en scène, l’utilisation des décors et des espaces, donnent un rythme trépidant à ce huis clos tendu ; les protagonistes se suivent et se pourchassent à travers la salle du palais de justice. Et c’est un autre point fort du film que de nous montrer cette confrontation comme une véritable traque à la vérité ; maîtrisée par l’inspecteur de façon quasi bestiale (magnifique Jacques Godin) et pour laquelle il n’y a pas d’issue possible. Face à lui, Yves, la bête blessée (émouvant Roy Dupuis), se joue du chasseur, se rebelle, puis finit petit à petit par s’avouer vaincu. Dans une traque comme celle-là, aucune possibilité de s’en sortir.

Par son modernisme, Being at home with Claude est un film à part dans la cinématographie québécoise ; un film dérangeant et novateur, reflet d’une société en plein changement.

Being at home with Claude – Québec, 1992 – Durée: 1h24 – Classement: 13 ans et plus – À Montréal, un inspecteur de police mène un interrogatoire afin de reconstituer les faits et d’éclaircir les motifs qui ont mené un prostitué à tuer un de ses amants – Avec: Roy Dupuis, Jacques Godin et Jean-François Pichette – Production: Louise Gendron – Scénario et Réalisation: Jean Beaudin, d’après René-Daniel Dubois

Ma note: 

Référence : Texte écrit en mai 2007 suite à un visonnement télé

Les notes :

★★★★★ Excellent
★★★★ Très bon
★★★ Bon
★★ Moyen
Mauvais

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