[Critique] Montréal la blanche: road-trip salutaire

Avec Montréal la blanche, Bachir Bensaddek offre des visages et des parcours à deux personnages issus de communautés immigrantes peu connues de notre cinématographie. Une confrontation personnelle et collective qui comporte quelques défauts, certes, mais remplie de sincérité.

Karina Aktouf et Rabah Ait Ouyahia dans Montréal la blanche (réal. Bachir Bensaddek - Dist. K-Films - source image: filmsquebec.com)

Karina Aktouf et Rabah Ait Ouyahia dans Montr̩al la blanche (r̩al. Bachir Bensaddek РDist. K-Films Рsource image: filmsquebec.com)

Montréal la blanche : l’hiver, la neige, la fête, et la solitude de deux étrangers. Montréal, un soir de veille de Noël. Un taxi. Amokrane, son chauffeur, qui s’oublie dans le travail sous prétexte que la soirée peut être très lucrative. Et Kahina, une femme perdue qui tente de récupérer sa fille. Bachir Bensaddek, dont c’est le premier long métrage, est un algérien d’origine. Kahina et Amokrane le sont aussi. Elle a accepté sa terre d’accueil, même si sa nouvelle vie n’a pas toujours été rose. Plongée dans le déni, elle refuse catégoriquement de revivre son passé et même d’en côtoyer les représentations. Amokrane, lui, a plutôt tendance à s’isoler dans sa culture d’origine, fortement marquée par son passé de combattant dont on revit quelques moments importants en flashback. Pour lui aussi le Québec ne semble pas avoir comblé tous les manques.

L’histoire évolue en mettant en parallèle ces vies brisées et une confrontation plus large dont Montréal est le théâtre. À l’extérieur du taxi, les rues sont illuminées, chaleureuses, prêtes à la fête. À contrario, dans l’habitacle, tout est sombre, sans joie, animé par le dialogue et les tensions. Par l’entremise du véhicule, huis clos idéal, le contact avec le Québec est rompu. Sans parler de cinéma-vérité, le film offre une jolie métaphore sur l’exclusion, qu’il n’aurait peut-être pas fallu renforcer par la scène de l’altercation avec un client du taxi, jugée superflue.

Non dénué de qualités formelles, ce road-trip hivernal possède néanmoins quelques travers. Notamment dans le déroulement peu organique de l’intrigue qui contient des péripéties forcées auxquelles on a du mal à croire. On regrette aussi des personnages secondaires un peu faibles, notamment le caricatural Père Noël incarné par un Pierre Lebeau plus vrai que nature.

Malgré ces imperfections, Montréal la blanche possède de beaux moments de sincérité et parvient à faire passer son message de tolérance, tout en permettant de saisir le désarroi d’êtres désarçonnés, ne sachant plus vraiment s’arrimer à leur propre histoire. Au final, Bachir Bensaddek nous livre un essai imparfait, mais qui a le mérite, quinze ans après L’ange de goudron de Denis Chouinard, de donner une existence à des communautés maghrébines dont on ne voit que très peu de représentation dans notre cinéma.

Montréal la blanche – Québec, 2015, 1h28 – Montréal. Les destins de deux Algériens d’origine se croisent un soir de Noël. Un passé dont ils se croyaient débarrassés ressurgit. – Avec: Rabah Ait Ouyahia, Karina Aktouf, Reda Guerinik, Mohammed Ait Ouyahia – Réal. et scén.: Bachir Bensaddek – Production: Cédric Bourdeau, Stéphane Tanguay – Distribution: K-Films Amérique

Ma note: 

Les notes :

★★★★★ Excellent
★★★★ Très bon
★★★ Bon
★★ Moyen
Mauvais

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