[Critique] Adam change lentement de Joël Vaudreuil

Pour son premier long métrage, Jaël Vaudreuil signe une satire sociale estivale originale et inusitée, quoiqu’un peu mince et prévisible.

Avec Adam change lentement, Joël Vaudreuil se lance à son tout dans le sempiternel récit estival mettant en vedette des adolescents tourmentés. Ce thème, largement exploité dans la fiction québécoise (À l’ouest de Pluton, Flashwood, Genèse, Une colonie, et tant d’autres), trouve toutefois ici une vision et une illustration bien particulière, qui séduit autant par sa forme que par la correspondance directe que celle-ci entretient avec la noirceur du sujet. Rien n’est vraiment beau dans la vision de la banlieue imagée par Vaudreuil. Les copains de classe sont méchants, les voisins sont bêtes comme leurs pieds et les filles sont soit ignorées, soit prises pour des objets.

Extrait du long métrage d'animation Adam change lentement de Joël Vaudreuil
Extrait du long métrage d’animation Adam change lentement de Joël Vaudreuil

Doté d’une vision non dénuée d’humour noir ravageur, le cinéaste regarde comment ces jeunes et moins jeunes se comportent envers Adam, un garçon au physique pour le moins atypique, en totale opposition avec les normes communément acceptées. L’occasion rêvée pour parler de mésadaptation sociale, de différence corporelle, de tolérance et de respect, mais également de solitude, des liens familiaux et de la solidarité dans l’adversité.

Sans être moralisateur, Joël Vaudreuil montre grâce à un trait épuré, trash et pas forcément très beau à regarder, que la soi-disant laideur et la difformité des corps (le petit voisin défiguré) sont d’autres versants de la « normalité ». Morose – mais doté d’une conclusion plus apaisante – le passage à l’âge adulte de l’ado difforme recèle en outre une saveur fantastique métaphorique assez intéressante dans sa façon de relier les changements physiologiques comme seule arme de défense de son héros sujet à moqueries. Du reste, on peut se demander qui d’Adam ou de ses copains sont véritablement les plus laids.

Cette façon de remettre les choses à leur place fait plaisir à voir tant elle est rare. Cela dit, le récit est peut-être un peu court et ses développements convenus. Quelques petites longueurs voient le jour au mitan. Toutefois, cela n’amoindrit pas la valeur du film, ni sa pertinence, et encore moins son caractère unique dans le domaine du long métrage d’animation québécois, traditionnellement coloré et vivant, mais aussi un peu mièvre.

Plus destiné aux adultes qu’aux jeunes publics, Adam change lentement est donc une belle surprise, qui confirme le talent de son cinéaste, auteur de plusieurs courts métrages reconnaissables entre tous.

Adam change lentement – Québec, 2023, 1h35 – Dans une banlieue ordinaire, un adolescent au physique ingrat passe un été compliqué – Avec: NA – Scénario et Réalisation: Joël Vaudreuil – Production: Parce Que Films – Distribution: FunFilm Distribution

Ma note: 

Les notes :

★★★★★ Excellent
★★★★ Très bon
★★★ Bon
★★ Moyen
Mauvais

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