[Critique] The Forbidden Room: la prouesse étirée

Hommage au cinéma des années folles The Forbidden Room est une prouesse technique et artistique, un océan de citations cinématographiques et de références hommagères. S’il est incomparable et unique en son genre, le film finit toutefois par lasser.

Roy Dupuis dans The Forbidden Room de Guy Maddin et Evan Johnson (source Métropole Films)

Roy Dupuis dans The Forbidden Room de Guy Maddin et Evan Johnson (source Métropole Films)

La prouesse étirée. Dans ce titre dont l’esprit s’inspire de la Margot kidnappée, personnage pivot du film, deux mots résument assez bien l’impression que l’on a lorsque l’on ressort de la projection. Hommage au cinéma des années folles et à la pellicule disparue – il est dit que le segment d’ouverture est repris d’un film perdu de 1937 –, The Forbidden Room est sans conteste une œuvre totale, absolue, une prouesse technique et artistique qui va bien au-delà de tout ce qu’a pu Guy Maddin nous donner jusque-là.

Mélangeant le filmage de performances jouées en public, utilisant des cartons explicatifs plutôt que des dialogues, torturant les images tant sur les formes que sur les couleurs, Maddin met à profit les multiples facettes d’une technologie débridée, libérant le film d’un cadre strict et noyant son (ses) intrigue(s) dans un océan de citations cinématographiques et de références hommagères.

Il prend le prétexte de nous enfermer dans un sous-marin avec quelques matelots au souffle court pour profiter de la moindre occasion qui se présente à lui de nous en faire sortir. Maddin veut volontairement perdre le spectateur dans un entrelacs échevelé, le laisser vagabonder au gré de ses envies. Le faire sauter d’un train en marche pour entrer dans un tripot glauque, passer du siège d’une moto à la table d’opération d’un chirurgien qui ôte la libido, ou faire surgir au détour d’un article de journal ou d’une tache sur un pantalon une nouvelle histoire imbriquée. Et le tout bien sûr, sans rapport évident à l’intrigue principale (la recherche de la belle Margot, kidnappée par une horde de loups rouges).

Seulement voilà, si la volonté de Maddin est de laisser la bride sur le cou à ses fans, on ne peut que se regretter la durée excessive de l’ouvrage. S’il est incomparable et unique en son genre, The Forbidden Room finit toutefois par lasser. Même raccourci de presque 15 minutes par rapport à ses premières projections en début d’année, le film est long, très long. Une telle débauche d’idées aurait peut-être mérité d’être un peu plus resserrée sur le sujet central, quitte à supprimer quelques-uns des caméos qui constituent ce labyrinthe étouffant. On en ressort épuisé plus qu’ébloui.

The Forbidden Room – Québec-Manitoba, 2014, 1h59 – Dans un sous-marin au bord de l’explosion, des marins cherchent le capitaine, aidés d’un bûcheron qui cherche la belle Margot kidnappée par une horde d’hommes-loups – Scénario: Guy Maddin, Evan Johnson, Robert Kotyk – Réalisation: Guy Maddin, Evan Johnson – Production: Buffalo Gal Pictures, ONF, Centre PHI – Distribution: Métropole

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