[Critique] Les scènes fortuites : entre l’amer et l’eau douce

Il y a certainement un talent d’auteur qui émerge de ces Scènes fortuites de Guillaume Lambert, mais le film manque vraiment d’homogénéité.

Image extraite de la bande annonce du long métrage Les scènes fortuites écrit et réalisé par Guillaume Lambert

Image extraite de la bande annonce du long métrage Les scènes fortuites écrit et réalisé par Guillaume Lambert

Il y a certainement un talent d’auteur qui émerge de Les scènes fortuites, de Guillaume Lambert, à tout le moins dans la capacité de son scénario de traduire l’instant, à capter l’errance, les doutes et les inconforts de la trentaine bohème, sans trop se préoccuper des conventions. Certes, c’est encore un peu brouillon, ça part dans toutes les directions sans réelle ossature, mais plusieurs séquences se démarquent. Entre autres celle du mariage, satirique à l’envie et joli clin d’œil aux Festen ou The Square de ce monde.

Bien sûr les personnages sont ultra-typés, à la limite de la caricature. Le frère (Lambert, qui confirme ici son côté lunaire remarqué dans Like-moi! et L’âge adulte), sa sœur inséparable (hilarante Valérie Cadieux), des collègues gentils, mais plutôt indifférents (Sarianne Cormier et sa canisse de jus)… Des éternels ados? En tout cas, des êtres un peu mal dans leur peau, vivant de petits boulots, aimant son prochain comme soi-même, c’est-à-dire sans grande passion, mais sans lâcheté non plus. Il y a de l’air du temps dans ces visages-là, une sorte d’instabilité permanente autant professionnelle que personnelle et le film l’illustre assez bien.

Mais au-delà de sa capacité à « pimper » le traditionnel dilemme du mâle québécois qui se cherche (on n’en sortira jamais), le récit de Lambert n’est pas juste une énième version de la valse-hésitation des bobos du Plateau Mont-Royal. C’est aussi une grinçante satire du milieu de l’audiovisuel, de ses professionnels condescendants, de ses émissions débilitantes, de ses relations biaisées et de ses jeux de pouvoir. Il est assez rare dans le cinéma québécois qu’un auteur, jeune de surcroit, ose aborder de front le métier dans lequel il évolue.

Par contre, il faut admettre que tout se complique lorsque l’on assemble les éléments de ce joyeux casse-tête. L’image d’ensemble a du mal à se dessiner. Composé de saynètes disparates, allant de la plus anecdotique à la plus profonde, le film n’arrive jamais à trouver l’homogénéité nécessaire, et encore moins la fluidité d’un développement narratif structurant. Trop de mailles à l’envers, trop de moments sans réelle signification (les rencontres avec les « SDF » par exemple). On ne se sort pas de la comédie à sketches style capsules web, « punchées » par des dialogues grinçants, mais somme toute assez peu cohérente. Alors même s’il n’est pas inintéressant, Les scènes fortuites en reste au stade de l’ébauche trop inégale pour captiver vraiment.

Les scènes fortuites – Québec, 2017, 1h20 – Damien Nadeau-Daneau, jeune cinéaste dans la trentaine, est en pleine crise existentielle devant son incapacité à terminer son film – Avec: Guillaume Lambert, Valérie Cadieux, Sarianne Cormier, Livia Sassoli, Bianca Gervais… – Scénario et Réalisation: Guillaume Lambert – Production: Laurent Allaire – Distribution: Entract Films

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