[Critique] Une vie pour deux : le poids des mots

Réalisé avec très peu de moyens, grâce à une résidence du centre PRIM, les auteurs d’Une vie pour deux font preuve d’une ingéniosité formelle remarquable.

Violette Chauveau (Simone), Jean-François Casabonne (Jean) dans le film Une vie pour deux

Violette Chauveau (Simone), Jean-François Casabonne (Jean) dans le film Une vie pour deux

Bien qu’il contienne 20 minutes d’une entrevue de Marie Cardinal à l’émission littéraire de Bernard Pivot en 1978, ce n’est pas un documentaire. Ce n’est pas non plus une fiction bien qu’il soit basé sur un scénario original d’Evelyne de la Chenelière inspiré de sa pièce basée sur le livre de Marie Cardinal ainsi que d’autres documents relatifs à la vie de l’auteure. Ce n’est pas du théâtre filmé non plus, bien qu’il reprenne en partie la pièce Une vie pour deux (La chair et autres fragments de l’amour) montée au printemps 2012 par Alice Ronfard, fille de l’auteure. Une vie pour deux d’Alice Ronfard et Luc Bourdon déjoue la catégorisation puisqu’il s’agit d’un mélange des trois genres ou, si l’on préfère, un projet expérimental, qui pour une fois mérite totalement le qualificatif d’incomparable.

De l’aveu des auteurs, présents ce samedi soir au cinéma Excentris, l’objectif de départ était de conserver une trace de la pièce originale, tout en lui donnant une orientation différente et une personnalité propre. Un « simple » travail de mémoire qui a pris forme en cours de confection et qui va bien au-delà des styles et des genres. Tenant plus de l’installation que du cinéma, Une vie pour deux a pourtant une réelle présence cinématographique.

Réalisé avec très peu de moyens, grâce à une résidence du centre PRIM, les auteurs ont réussi à compenser les problèmes causés par un tournage de seulement deux jours par une ingéniosité formelle remarquable. Le film étonne, grâce notamment aux respirations dans le récit rendues possibles par les dialogues insérés sur un écran noir et des gros plans criants de vérité, . Nous sommes dans l’écran, au milieu de la scène avec les comédiens. À ces moments impossibles à capter lorsque nous sommes assis dans un fauteuil de théâtre, s’ajoutent le mouvement des corps, les regards et les effets de mise en scène utilisant justement la profondeur de champ.

Nous sommes donc à mille lieux d’une traditionnelle captation théâtrale, bien que le film fasse la part belle aux comédiens et puisse être vu comme un hommage à l’art de la scène, tout en laissant une trace inoubliable de la beauté et à la force des textes de Marie Cardinal.

Incarnant à la perfection ce triangle amoureux peu banal, Violette Chauveau, Évelyne de la Chenelière et Jean-François Casabonne sont magnifiés par les caméras de John Dyer et Nicolas Fournier. La prestation de Violette Chauveau (récipiendaire du Prix d’interprétation féminine de l’année décerné par l’Association québécoise des critiques de théâtre), est tout simplement fulgurante.

Pour quelques jours encore au cinéma Excentris de Montréal.

Une vie pour deux – essai – Québec, 2013, 1h15 – Au premier jour de leurs vacances, un homme découvre un cadavre sur la plage. Ce fait divers fera éclater le couple – Avec: Violette Chauveau, Jean-François Casabonne, Evelyne de la Chenelière – Scénario: Évelyne de la Chenelière – réalisation: Luc Bourdon, Alice Ronfard – Production: PRIM – Distribution: PRIM

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