Simple comme Sylvain – Film de Monia Chokri

Pour son 3e long métrage, la cinéaste aborde les rapports de couple et les différences de classe, à travers les péripéties amoureuses de deux protagonistes issus de milieux que tout oppose.

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Simple comme Sylvain est une comédie sentimentale écrite et réalisée par Monia Chokri. Coproduit par le Québec et la France, le troisième long métrage de la réalisatrice de La femme de mon frère et Babysitter relate une passion incandescente unissant une intellectuel dans la quarantaine et un contracteur un peu rustre qu’elle a embauché pour rénover son chalet. Porté par l’humour acidulé et le verbe haut – comme les précédents films de la cinéaste -, Simple comme Sylvain questionne les rapports de couple et les différences de classe, à travers un triangle amoureux mettant aux prises deux protagonistes issus de milieux radicalement différents.

Présenté en première mondiale dans la section Un certain regard du Festival de Cannes en mai 2023, Simple comme Sylvain (The Nature of Love en version avec sous-titres anglais) a été projeté dans quelques festivals par la suite, notamment le Festival du film romantique de Cabourg, où il a remporté deux prix. La première canadienne a eu lieu en septembre 2023 au TIFF, quelques jours avant sa sortie en salle au Québec, le 22 septembre. En France, Simple comme Sylvain devrait arriver sur les écrans le 8 novembre.

Entrevue avec la réalisatrice

Avec Simple comme Sylvain, vous filmez le couple comme un fait social. Qu’est-ce qui a fait germer cette réflexion chez vous ?

C’est venu de façon évidente. Je trouve que les films romancent beaucoup la rencontre amoureuse, ignorent l’environnement social – c’est pourtant tellement fondateur de ce que va devenir un couple. J’ai moi-même eu plusieurs manières de vivre en couple et j’ai pu m’apercevoir de tous les paramètres qui vont au-delà des seuls individus. À un moment donné, tout ce qui est autour prend le pas sur la relation en elle-même. Les amis, la famille, le travail, le voisinage, tout cela pèse sur elle.

Ce sont ces questionnements qui ont déclenché l’envie de faire ce film ?

J’avais surtout envie de filmer une histoire d’amour. Il y a un sujet assez obsessionnel dans mon travail jusqu’à maintenant : l’impossibilité, l’empêchement de l’amour. Dans La Femme de mon frère, il s’agissait d’une relation frère-sœur, mais c’était déjà là. Je voulais poursuivre cette recherche car elle est sans fin. Mais ce qui m’intéressait aussi, c’était de filmer deux mondes qui se rencontrent. Que se passe-t-il si deux personnes qui ont un vrai potentiel amoureux sont issues de milieux complètement différents ?

L’héroïne, Sophia, explore l’amour et le désir de manière pratique avec son amant Sylvain, mais aussi de manière théorique en tant que professeure de philo. Quel trajet de pensée emprunte-t-elle à travers ses lectures : Platon, Spinoza, Jankélévitch, bell hooks… ?

L’idée, c’était de raconter à travers différentes périodes de l’histoire la manière dont les philosophes ont pensé l’amour. Etonnamment, je me suis rendu compte que ça avait été un sujet assez peu étudié dans le domaine de la philo. Je dirais même que ça a été boudé, perçu comme vain, pas assez noble. J’ai lu des tonnes d’ouvrages, tout ce que je pouvais trouver ! Ça m’a permis de structurer le parcours de Sophia. bell hooks, elle est arrivée plus tard, en cours de montage. J’étais assez contente de la glisser en voix-off parce que, jusque-là, je n’avais pratiquement rencontré que des penseurs hommes qui parlaient d’amour. Enfin, il y a bien Hannah Arendt, mais elle va dans quelque chose de très métaphysique, en parlant de l’amour selon Saint Augustin, donc c’est assez cryptique. Je me suis dit que c’est intéressant : on est comme conditionnés par des théories masculines de l’amour – des visions qui se déploient aussi dans nos imaginaires. Quand je suis tombée sur À propos d’amour de bell hooks, j’ai trouvé ça incroyable de justesse et de profondeur. C’est vraiment un livre qui apprend à aimer mieux. Elle dit que l’amour est une action, et que donc on peut choisir, décider d’aimer. Ça veut dire qu’on n’est pas tributaire de l’autre. Ça a changé ma vie, cette parole. On est maîtres de nos sentiments.

Sophia a 40 ans et enseigne à des gens plus âgés qu’elle. Cette question de prendre de l’âge traverse le film. Cela renvoie-t-il à votre rapport au temps qui passe ?

Quand on tombe amoureux, qu’on a le désir de vivre cette passion, on n’a pas le temps. Personne ne peut le voir à part moi, mais dans le film il y a énormément de références à mon enfance et à mon adolescence. Dans la deuxième scène du film, Sophia met de l’essence dans sa voiture et regarde des adolescents s’embrasser. On sent sa nostalgie d’un sentiment qu’on ne peut vivre qu’adolescent, ou très jeune. Même si on peut vivre de telles passions plus tard, ça devient plus rare. Mais quand ça nous tombe dessus, on retombe un peu en adolescence. Quand Sophia rencontre Sylvain, elle a ce besoin de vivre quelque chose, qui a à voir avec un dernier éclat de jeunesse avant de rentrer dans un âge plus calme. Et puis, je n’en parle pas de manière évidente dans le film, mais elle est aussi confrontée à l’idée de la maternité. Elle en parle deux fois. La première fois, elle est dans la voiture et elle dit « En même temps, faire des enfants à notre époque, quelle angoisse ! » Puis elle en reparle avec Sylvain à qui elle dit : « Je n’ai jamais voulu d’enfant, mais avec toi je pense que j’aimerais. »

Sophia est d’ailleurs entourée de figures de mères. Qu’est-ce que son personnage raconte de l’époque quant à la maternité ?

Elle se pose la même question que nous tous sur le fait d’avoir ou non des enfants. Moi je n’ai pas d’enfant parce que premièrement j’ai été indécise et deuxièmement je pense que dans notre structure sociale et économique, ça représente encore un asservissement pour les femmes. On pose beaucoup cette question aux femmes ; j’ai été avec un mec pendant dix ans, et on ne la lui posait jamais ! Il faut que les hommes comprennent cette injonction. Et la seule manière pour qu’ils la saisissent, c’est d’écrire notre histoire, qu’on nous donne le droit de la raconter et de la diffuser.

Extraits de l’entrevue avec la réalisatrice disponible dans le dossier de presse de Simple comme Sylvain fourni par Immina Films

Résumé

Sophia est professeure de philosophie dans un établissement fréquenté par des aînés. À 40 ans bien sonnés, elle semble se satisfaire de la drôle d'alliance qu'elle forme avec Xavier, son conjoint depuis 10 ans avec qui elle ne partage plus le lit. De leur union, est née de l'amitié et de la complicité, des discussions intellectuelles répétées et stimulantes, des habitudes de vie saines, mais certainement pas la passion. Sans le savoir, et encore moins se l'avouer, Sophia vit dans un profond manque d'affection. Alors, lorsqu'elle rencontre Sylvain, le contracteur embauché pour rénover le chalet des Laurentides qu'elle vient d'acheter, le coup de foudre prend la forme d'un coup de massue. Follement éprise de ce bûcheron sexy, simple et franc, elle se laisse aller à une passion charnelle sans limites. Sauf que le bellâtre en question est loin d'avoir son bagage social. Leur amour résistera-t-il aux différences de classe?

©Charles-Henri Ramond

Distribution

Magalie Lépine Blondeau (Sophia), Pierre-Yves Cardinal (Sylvain), Francis-William Rhéaume (Xavier), Monia Chokri (Françoise), Steve Laplante (Philippe), Marie-Ginette Guay (Sylvie), Guy Thauvette (Pierre), Micheline Lanctôt (Madeleine), Guillaume Laurin (Olivier), Christine Beaulieu (Karine), Mathieu Baron (Kévin), Linda Sorgini (Guylaine), Lubna Playoust

Fiche technique

Genre: comédie sentimentale - Origine: Coproduction Québec-France (85%-15%), 2023 - Durée: 1h52 - Langue V.O.: Français - Images: tournage 35mm, ratio 1.85:1 - Visa: 13 ans et plus (érotisme) - Budget approximatif: N/C - Tournage: automne 2022, dans les Laurentides et à Montréal - Première: 18 mai 2023, Cannes - Sortie en salles: 22 septembre 2023 (QC), 8 novembre 2023 (FRA)

Réalisation: Monia Chokri - Scénario: Monia Chokri - Production: Nancy Grant, Sylvain Corbeil, Nathanaël Karmitz, Elisha Karmitz - Productrice associée: Marie-Claire Lalonde - Producteur exécutif: Philippe Lombart - Sociétés de production: Metafilms (QC), MK Productions (FRA), avec la participation financière de Téléfilm Canada, SODEC, crédits d'impôts fédéraux et provinciaux - Distribution: Immina Films (QC), Memento Distribution (FRA)

Équipe technique - 1er assistant réal.: Cédric Kluyskens - Costumes: Guillaume Laflamme - Conception artistique: Colombe Raby - Décors: Kimberley Thibodeau - Distribution des rôles: Annie St-Pierre - Montage images: Pauline Gaillard – Musique: Émile Sornin - Photographie: André Turpin - Scripte: Nathalie Paquette - Son: François Grenon, Julien Roig, Olivier Guillaume

Infos DVD/VOD

Simple comme Sylvain est disponible depuis le 12 décembre 2023 en combo Blu-Ray + DVD ainsi qu’en vidéo sur demande (location ou achat) sur les plateformes de Vidéotron, Bell, Cogeco, Telus, Cineplex, Apple TV, Amazon Prime, Google Play, Itunes ou Vimeo.

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Né en décembre 2008, Films du Québec est un site d'information indépendant, entièrement dédié au cinéma québécois de fiction. Films du Québec contient les fiches détaillées des films québécois, des actualités, des critiques et des bandes annonces et bien plus.
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