[Critique] Avant les rues : beau et généreux

À la croisée des chemins de l’expérience de la cinéaste en matière de fiction et de son travail avec le Wapikoni Mobile, Avant les rues est une belle histoire de rédemption et de pardon. Un premier long métrage effervescent et généreux.

Image extraite du film Avant les rues - La purification de Shawnouk

Image extraite du film Avant les rues – La purification de Shawnouk

Avant les rues, premier long métrage de fiction de Chloé Leriche parvient à conjuguer les deux mondes, celui irréel qui se niche dans l’irréel des légendes et celui, plus dramatique, du quotidien. Au final, une Å“uvre effervescente et belle se dégage, à l’instar de la scène inoubliable de la purification dans les bois, lente, filmée à distance comme pour ne pas déranger le protocole. Sans doute ce que le cinéma de fiction québécois a fait de plus sensible sur les peuples autochtones, depuis longtemps.

Lové au creux d’une communauté atikamekw qu’elle connaît visiblement bien, son film parvient à en faire ressortir la poésie de ses rituels, mais aussi, car c’est une réalité qui semble trop lourde pour être occultée même dans le cinéma de fiction, la dureté de sa condition humaine. Chômage, vétusté, suicide, des difficultés qui sont montrées ici par petites touches, sans dramatisation excessive. Outre ces problèmes endémiques, Leriche montre aussi les relations tendues avec l’extérieur, les blancs. D’une manière peut-être un peu trop rigide, malgré tout. Ils sont soit des intrus qui viennent sur le territoire pour mettre leur nez dans une enquête interne (les flics de la SQ), soit ceux par qui le mal arrive (Martin Dubreuil petit malfrat venu d’ailleurs qui paye Shawnouk pour l’emmener dans sa virée mortelle). Dans ce lieu clos, contaminé par l’autre, la recherche de la vérité est donc affaire personnelle.

Car on comprend vite que l’homicide n’est pas le sujet. Quelques indices trop facilement exposés (le pistolet traînant là, le portefeuille oublié) nous mettent sur la piste. On connait le coupable, et on sait que tôt ou tard il sera démasqué. Avant les rues se concentre plutôt sur la quête personnelle, la recherche de soi, ce qui fait que les valeurs ancestrales ont encore tout leur sens aujourd’hui. Shawnouk, jeune homme désœuvré, vient de le comprendre. Une thérapie en profondeur lui fera mieux prendre conscience de lui-même, de son peuple et finalement de l’univers.

Dans la réserve, avant les rues, il y avait les bois, la tente à sudation, et les chants traditionnels. Le ton est juste, le tableau est de ceux qui interpellent par leur générosité. À la croisée des chemins de l’expérience de la cinéaste en matière de fiction et son travail avec le Wapikoni Mobile, Avant les rues est un premier long fort intéressant qui en appellera d’autres à n’en pas douter.

Avant les rues – Québec, 2015, 1h39 – Shawnouk tue un homme lors d’un vol à main armée. Après s’être évadé en forêt, il retourne dans sa communauté et cherche à se libérer par la pratique de rituels traditionnels – Avec: Rykko Bellemare, Kwena Bellemare Boivin, Jacques Newashish, Martin Dubreuil – Scénario: et Réalisation: Chloé Leriche – Production: Les Films de l’Autre – Distribution: FunFilm

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