Six ans après Route 132, road movie oscillant entre rires et drame, voilà donc le retour attendu de Louis Bélanger à la barre d’un long métrage de fiction. Les mauvaises herbes est une comédie en apparence non politiquement correcte dans laquelle la rencontre d’un intellectuel hautain criblé de dettes (Alexis Martin) et d’un vieux bourru planteur de pot qui a besoin d’un coup de main pour sa récolte (Gilles Renaud) fusionne dans une sorte de compromis de bon aloi, qui finalement sied à tout le monde.
La relation d’amitié puis de filiation qui s’installe entre les deux hommes de générations et de cultures différentes, un thème que Bélanger avait déjà illustré dans Gaz Bar Blues, dévie l’intrigue vers des tonalités plus feutrées, apportant de facto un élan de sentimentalisme convenu et peu original, tout en permettant de conserver sauve une certaine morale, ni trop dérangeante, ni trop subversive.
On est donc dans un cinéma du juste milieu, dans une comédie suffisamment maîtrisée pour plaire à tous. L’ajout du personnage féminin (une jeune technicienne de l’hydro qui vient foutre le bordel au sein du duo infernal, avant elle aussi de s’allier les services de deux comparses) plus jeune et plus moderne procure quelques occasions de rire, mais surtout une scène assez juste dans laquelle la jeune femme défend ses choix de vie (elle est homosexuelle) et laisse aller sa colère contre ces deux machos rétrogrades. La jeunesse québécoise soi-disant fragile et mal assurée l’en remercie.
Outre ce personnage somme toute assez rafraîchissant, on rit de bon cœur dans le film de Bélanger, les dialogues étant, comme dans bien des comédies québécoises, de vraies répliques de stand-up comic. Hélas, l’opposition entre Montréal et régions ne nous convainc pas, une fois de plus. Le film s’essouffle assez vite tant les personnages restent trop proches du stéréotype. Plusieurs scènes peinent à remplir leurs effets comiques (Luc Picard peu convaincant, l’intervention du club compassion qui s’étire) et l’ensemble nous rappelle trop les péripéties de Matroni et moi (Jean-Philippe Duval, 1998), dans lequel Alexis Martin occupait aussi le rôle de l’intello de service et Pierre Lebeau celui de gangster mal dégrossi. Sans aller jusqu’à parler de recyclage, ces Mauvaises herbes nous apparaissent un peu défraîchies.
Les mauvaises herbes – Québec, 2015, 1h47 – Un acteur de théâtre ayant contracté une lourde dette auprès d’un shylock de Montréal se retrouve sur les terres d’un vieux bougon qui fait pousser du pot dans sa grange – Avec: Alexis Martin, Gilles Renaud, Emmanuelle Lussier-Martinez, Luc Picard – Scénario: Alexis Martin, Louis Bélanger Réalisation: Louis Bélanger – Production: Lorraine Dufour, Luc Vandal – Distribution: Les Films Christal
Ma note: