[Critique] Corbo : mortel combat

Corbo est une œuvre de première nécessité qui traite avec justesse d’un moment encore douloureux de l’histoire du Québec, enterré au fin fond des manuels scolaires. Traité avec justesse et impartialité, le film permet également de mieux saisir le moment présent. À voir.

Corbo : le groupe de jeunes felquistes (source : Les Films Séville)

Corbo : le groupe de jeunes felquistes (source : Les Films Séville)

Corbo, premier long en solo de Mathieu Denis, est plus qu’une belle entrée en matière. Car rarement aura-t-on vu une intrigue embrassant aussi naturellement le contexte sociopolitique qu’elle est chargée de dépeindre. Certes, la faible amplitude des unités de temps (à peine plus de trois mois) et de lieu (le quartier St-Henri principalement) permet à Denis de garder le contrôle entier sur son histoire et de resserrer son film sur Jean Corbo, personnage tombé dans l’oubli dont l’imagerie sort enfin au grand jour.

Montrant avec acuité les différences sociales du Québec des années soixante (les riches de Mont-Royal et les exploités de St-Henri), Corbo possède un style sans doute un peu trop classique et linéaire. Toutefois Denis sait s’appuyer sur une direction artistique irréprochable (comme bien des longs métrages québécois plongés dans cette époque), l’interprétation convaincante de jeunes comédiens parfaitement dirigés ainsi que sur une direction photo subtile qui tire partie des diverses nuances de teintes sombres pour tracer un portrait sociétal complexe et torturé, un peu à l’image de son personnage central.

Outre l’esprit de liberté qui soufflait sur la jeunesse de cette époque, le milieu dépeint ici sonne parfaitement juste. On y traite de l’asservissement de la femme (Marie Brassard, mère de Jean, est totalement écrasée par son mari), de la difficile intégration des italo-canadiens qui n’est pas sans nous rappeler le travail de Paul Tana dans La déroute ou celui de Ricardo Trogi dans ses deux comédies 1981 et 1987, ainsi que de l’éducation stricte prônée par les collèges classiques, d’ailleurs appelés à être remplacés peu de temps après.

En somme, Corbo se révèle une Å“uvre de première nécessité qui traite avec justesse d’un moment encore douloureux de l’histoire du Québec, enterré au fin fond des manuels scolaires. 50 ans après les événements, le film s’avère donc une pierre importante à l’édification de notre mémoire collective et permet également de mieux saisir le moment présent. Une telle richesse intemporelle est si rare qu’elle se doit de ne pas être ignorée.

Corbo – Québec, 2014, 1h59 – Jean Corbo, un jeune québécois d’origine italienne, rejoint les rangs du FLQ et s’engage dans la lutte terroriste – Avec: Anthony Therrien, Antoine L’Écuyer, Karelle Tremblay, Tony Nardi – Scénario: et Réalisation: Mathieu Denis – Production: Félize Frappier – Distribution: Films Christal

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