[Critique] Paul à Québec : sucre à la crème indigeste

Conçu pour plaire au plus grand nombre et pour émouvoir les cœurs les plus durs, Paul à Québec verse dans le mélo le plus pur et n’exploite pas suffisamment les bonnes idées scénaristiques que son personnage central pouvait laisser entrevoir.

Shanti Corbeil-Gauvreau, François Létourneau, Julie Le Breton et Gilbert Sicotte dans Paul à Québec (source image : Remstar)

Shanti Corbeil-Gauvreau, François Létourneau, Julie Le Breton et Gilbert Sicotte dans Paul à Québec (source image : Remstar)

Une histoire bien de chez nous, des paysages bucoliques de bord du fleuve, un retour aux racines familiales et, comme nombre de fictions québécoises ces temps-ci, quelques lignes de dialogue comiques pour dédramatiser le tout. Avec tout ça, condensé dans une intrigue tricotée pure laine basée sur un bestseller québécois, des bons sentiments qui débordent et une nostalgie de bon aloi,  Paul à Québec fera sans doute un carton dans les salles cet automne. C’est en tout cas pourquoi il existe. Pour plaire au plus grand nombre et pour émouvoir les cœurs les plus durs.

Au centre du film, la société québécoise blanche et francophone, la famille, et un tournant de siècle qui apporte un lot de changements perturbants. Campé dans cette période qui apparaît aujourd’hui comme un pivot majeur dans l’évolution de notre société (mondialisation, arrivée de l’informatique personnelle et avec elle une société des loisirs inébranlable), Paul à Québec n’est pas seulement une chronique familiale douce amère, c’est aussi l’évocation d’un cocon sociétal qui vole en éclat. Mais en dehors de quelques répliques rigolotes sur les ordinateurs, les auteurs ne se servent pas de ce terreau là.

Paul, timide et un peu en retrait, s’invente une vie par le biais du dessin. Belle idée. Au fur et à mesure que la maladie de son beau-père avance, son processus créatif prend naissance dans un imaginaire un peu naïf et se construit peu à peu comme une carapace en réaction aux soubresauts de la vie et à la mort. Mais la force narrative que constitue ce personnage éloigné de la tourmente vivant dans une nostalgie contemplative, n’est aucunement exploitée, en dehors de quelques dessins parsemés ça et là durant l’histoire. Le film n’en reste qu’au stade de l’intention et délaisse la construction de Paul version BD qui apportait pourtant une vision dépersonnalisée et donc une distance nécessaire à l’observation du drame que Paul version 3D est en train de vivre.

Le mélo finit par l’emporter et avec lui, plus de la moitié du film. Bouvier et Rabagliati s’y vautrent. Les assises solides de l’intrigue ainsi sabordées, le film ne repose plus sur rien, et se contente de montrer en gros plan le visage d’un mourant et de ses proches ensevelis sous les flots de larmes de crocodile. Les personnages n’ont alors plus grand-chose à proposer. À court d’idées, Paul à Québec se contente malheureusement de n’être qu’un sucre à la crème un peu trop indigeste.

Paul à Québec – Québec, 2015, 1h38 – Paul, fils d’un imprimeur mis à la retraite vit des heures douloureuses avec sa femme, sa fille et sa belle famille alors que Roland se meurt d’un cancer – Avec: François Létourneau, Gilbert Sicotte, Julie Le Breton et Louise Portal – Scénario: François Bouvier et Michel Rabagliati Réalisation: François Bouvier – Production: André Rouleau, Valérie d’Auteuil, Nathalie Brigitte Bustos, Karine Vanasse – Distribution: Remstar

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