En 2007, bien que n’étant pas le premier à puiser dans le terreau fertile de nos fantasmes, Huard, en plus de quelques scènes adroitement réalisées, donnait au moins à ses 3 p’tits cochons l’illusion de l’originalité en offrant, outre des moments de tendresse sincère (Lemay-Thivierge et la mère mourante, incarnée par France Castel), et des variations assez justes sur le couple moderne sujet à de multiples remises en cause (notamment le couple Richer-Legault, le plus approfondi des trois). Un gros succès en salles vint couronner cette première réalisation du célèbre chauffeur de taxi québécois. Il n’en fallait pas plus pour qu’une suite voie le jour…
Neuf ans plus tard, Les 3 p’tits cochons 2 arrivent en terrain très balisé, pour ne pas dire miné. Il faut dire que depuis, il ne se passe pas une année sans que notre cinéma revisite plus ou moins directement les déboires du mâle québécois. Torturé par une adolescence non complétée (Lemay-Thivierge), une vie de couple maganée (Robitaille) ou des pulsions intimes refrénées (Doucet), l’homme et ses doutes forment désormais un sujet largement exploité par notre cinématographie. Cette idée initiale porteuse au box-office, mais à l’intensité narrative assez facilement épuisable a été dévoilée assez justement dans Horloge biologique (2005), reprise dans Lucidité passagère (2010), massacrée par Filière 13 (2010), et remise au goût du jour avec plus de bonheur dans Le mirage l’an dernier. Et sans parler des téléséries récentes, elles aussi très enclines à mettre en avant les hauts et les bas de nos petites vies ordinaires.
Pour surmonter ce fort sentiment de déjà-vu, renforcé ici par la présence de Patrice Robitaille, dont le registre a tendance à se concentrer sur un personnage-type servi à volonté, il aurait fallu que ces trois cochons nous offrent largement plus. Plus de rires, plus de réflexion, plus de remise en question de la société dans laquelle ils évoluent. Or, des turpitudes volages montrées dans cette suite où le propos reste bloqué sous la ceinture, rien ne retient l’attention. Strictement rien. S’essoufflant dans une surenchère de situations prévisibles, de dialogues ridicules et de quiproquos éculés, nos frangins libidineux n’ont rien de plus à dire de nous-mêmes que ce que disaient déjà les femmes en or ou les chats bottés d’antan [1]. Aussi vulgaire qu’involontairement homophobe, aussi insignifiant qu’inutile, Les 3 p’tits cochons 2 perd sur toute la ligne au jeu des comparaisons avec son populaire prédécesseur.
Les 3 p’tits cochons 2 – Québec, 2016, 1 h 42 – trois frères ont maille à partir avec leurs conjointes, amants, blondes et chums et revivent des démons pulsionnels incontrôlés – Avec: Paul Doucet, Guillaume Lemay-Thivierge, Patrice Robitaille – Scénario: Pierre Lamothe, Claude Lalonde – Réalisation: Jean-François Pouliot – Production: Christian Larouche – Distribution: Christal Films
Ma note:
[1] : Il y a dans Les 3 p’tits cochons 2 un comparatif sur les plaisirs procurés par la femme et par l’homme… d’un ridicule aussi évident que le « C’est plus facile de guérir une tapette que de poursuivre la police », réplique de Donald Pilon dans le film de Fournier.